Dans un rapport final qu’elle s’apprête à publier en novembre prochain, l’Onu indexe l’Ouganda au même titre que le Rwanda dans l’insécurité créée et entretenue dans l’Est de la RDC par le M23. Les experts des nations unies mettent à nu la répartition des tâches entre les deux capitales :  Kigali a coordonné la création du M23 comme ses principales opérations militaires, alors que l’Ouganda a permis à la branche politique du mouvement d’opérer à Kampala et de développer ses liens avec l’extérieur.

Désormais, c’est clair, Kagame et Museveni ne peuvent plus se dérober en se retranchant derrière des démentis farfelus. Ils sont accablés, leur implication étant établie dans la déstabilisation et la partition de la RDC.

L’Onu s’apprête à rendre public en novembre prochain son  rapport final sur la situation sécuritaire en RDC. D’ores et déjà, des sources sont tombées sur des fuites de ce rapport comme il en fut le cas pour le rapport préliminaire qui a fait tabac en juin dernier. « Le Rwanda et l’Ouganda soutiennent la rébellion armée du M23 », écrit l’agence britannique Reuters en citant les experts des Nations unies. Reuters dit avoir réussi à se procurer une copie de ce rapport, aussi en a-t-elle fait l’économie. L’élément nouveau ici c’est l’indexation de l’Ouganda au même titre que le Rwanda. Du coup, l’on s’aperçoit des maquillages qui sont organisés pour flouer le gouvernement dans des initiatives au plan bilatéral, sous régional et continental.

Quid ? Le rapport des experts de l’Onu établit clairement la répartition des tâches entre les deux capitales dont la complicité ne date pas d’hier. Leurs dirigeants sont sortis d’un même moule et on les a vus à l’oeuvre en 1996-1998 lors de la première agression de la RDC. Ils ont mené ensemble des incursions sur le territoire et depuis lors, ils n’ont jamais lâché du lest, malgré quelques couacs de parcours. Lesquels ont poussé la communauté internationale à reconnaître, en définitive, leur rôle de pivot dans la marche de la défunte AFDL, présentée à l’époque comme une rébellion salvatrice de la RDC. C’est le cas de la bataille de Kisangani entre les armées rwandaise et ougandaise en 1998.

Voilà que, quinze ans plus tard, l’histoire vient de se répéter. Pourquoi ? Les objectifs poursuivis par les faiseurs de guerre ne sont pas encore atteints. Et puisque l’on dit que les mêmes causes produisent les mêmes effets sont revenus à la charge. Les dernières révélations montrent à suffisance que les désaccords entre les deux complices étaient liés aux ambitions personnelles au-delà des intérêts des parrains communs et vrais commanditaires des conflits armés qui endeuillent l’Est de la RDC.

Il apparaît aujourd’hui que ces différends ont été montés en chandelle pour endormir l’opinion congolaise et au besoin, la communauté internationale. Au fond, les deux voisins sont toujours d’accord sur l’essentiel, à savoir la déstabilisation et la partition de la RDC. Bref le Rwanda n’a jamais rompu avec l’Ouganda. Ou alors, ils ont été forcés à se réconcilier afin de poursuivre leur sale boulot.

C’est ce que vient de démontrer le rapport des experts des Nations unies : «  Kigali a coordonné la création du M23 comme ses principales opérations militaires, alors que l’Ouganda a permis à la branche politique du mouvement d’opérer à Kampala et de développer ses liens avec l’extérieur ». Le groupe d’experts des Nations unies affirme que ces derniers mois, Kigali et Kampala ont continué, malgré leurs démentis (somme toute fantaisistes) d’aider les rebelles congolais du M23 dans l’Est de la RDC.

Pyromanes et sapeurs-pompiers

Là où le bat blesse c’est lorsque les deux agresseurs de la RDC prétendent contribuer à apporter des solutions pour la cessation des hostilités et un retour de la paix en RDC et dans les Grands Lacs. Des rencontres bilatérales et sous régionales sont organisées dans les deux capitales. Ceci pouvant expliquer cela, l’on comprend pourquoi toutes les initiatives prises au niveau de la CIRGL (Conférence internationale pour la région des Grands Lacs) et de l’UA sont dans l’enlisement.

C’est donc sans surprise que les rebelles du M23 gagnent chaque jour du terrain, cependant que se succèdent des sommets et autres rencontres à tous les niveaux. Pire, les rebelles du M23 ont excellé, confirment ces experts, dans le recrutement d’enfants soldats estimés à 250.

Ce nouveau rapport de l’Onu confirme, à n’en point douter, toutes les appréhensions que l’on se faisait sur l’attitude ambigüe qu’entretenait l’Ouganda autour de la crise congolaise. Président en exercice de la CIRGL, l’Ouganda a clairement affiché, pendant toutes les rencontres menées à domicile -quatre au total, son penchant pour le Rwanda, allant jusqu’à soutenir l’idée d’une négociation directe entre Kinshasa et le M23, malgré l’opposition manifeste de la RDC à cette option.

Avec la dernière révélation de l’Onu, les masques viennent de tomber. Il est dès lors établi que Kampala ne joue pas franc jeu avec Kinshasa au sein de la CIRGL. Pas étonnant que toutes ces négociations aient accouché jusque-là d’une souris. Pendant ce temps, dans le Nord-Kivu, c’est le statu quo. Autant dire que Kigali et Kampala jouent à la fois aux pyromanes et aux sapeurs-pompiers.

Sortir de son mutisme

Malgré toutes ces révélations, Kinshasa affiche une attitude qui s’apparente la nonchalance. De la CIRGL à l’Onu, en passant par l’UA, et tout récemment au l4eme Sommet de la Francophonie (tenue à Kinshasa), la RDC a usé du langage de bois, évitant de nommer les coupables. Pourquoi ces réserves ? Se sentirait-il redevable vis-à-vis de ces deux pays ?

Il ne reste plus qu’à Kinshasa de savoir lire les signes des temps et décapitaliser toutes les condamnations de la communauté internationale à l’encontre de ses deux voisins qui le roulent dans la farine à chaque étape des négociations. Bien plus, le gouvernement congolais devrait recadrer son action pour libérer les territoires occupés par le M23. Cela en sortant de son mutisme et de son attentisme.

Le Potentiel