GRANDS LACS
Julien Paluku : « il faut démocratiser les institutions de Kigali ».
Pour monsieur Julien Paluku, Gouverneur du Nord Kivu, la paix dans la région des Grands Lacs passe essentiellement par la
démocratisation effective des institutions au Rwanda. Il croit dur comme fer que c’est par un dialogue officiel et ouvert entre le pouvoir de Kigali et les rebelles des Forces
Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR) notamment qu’une paix durable pourra s’installer dans la région. Un argument qui tombe après que la Tanzanie se soit refusée d’envisager
toute démarche de réparation diplomatique avec le Rwanda toujours agacé dit-on, par les propos du président Jakaya Kikwete. Celui-là même qui avait ouvert le bal en proposant le plus
officiellement du monde, cette formule magique qui indispose au Rwanda, tous les démons des conflits récurrents des Grands Lacs.
Le gouverneur Paluku qui gère depuis plus de cinq ans la province problématique du Nord-Kivu estime que tous les rwandais se trouvant à l'extérieur ne
doivent pas être considérés comme des génocidaires. Puisque soutient-il, parmi eux l’on distingue trois catégories des personnes. Il y a d’abord les hommes les plus recherchés de la
justice internationale. Les véritables criminels qui ont perpétré le génocide au Rwanda en 1994. Ces individus, bien qu’appelés à faire amande honorable auprès de leurs compatriotes pour
les crimes imprescriptibles et crimes de génocide commis contre leurs propres frères, ils devraient avoir un traitement beaucoup plus sévère de la part du gouvernement rwandais. Il y a
ensuite les réfugiés politiques rwandais qui fuient le régime monolithique et la terreur installés à Kigali depuis 19 ans et dont on ne sent pas la moindre tendance de partage du pouvoir
entre tous les fils et filles du Rwanda. L'illustration est la condamnation d’une opposante de renommée internationale, madame Ingabire dont le seul péché est d’avoir osé se présenter
candidate aux présidentielles de 2010. Elle a été condamnée à 8 ans de prison ferme, peine qui s’étendra jusqu'en 2018. Tout ceci, afin de l'empêcher de se représenter aux présidentielles
de 2017. C’est ici que le Gouverneur Julien Paluku étale son exaspération et appelle le Président Paul Kagame à dialoguer avec cette catégorie des rwandais qui n'ont rien à voir
avec le génocide mais à qui on a toujours collé ces crimes contre leur silence.
Il y a enfin ces autres rwandais que le génocide a trouvé à fleur d’âge, alors mineurs (moins de 18 ans en 1994). Ces inconscients d’hier sont gratuitement
taxés de participation au génocide alors qu’ils n’étaient ni de près ni de loin mêlés aux atrocités de 1994. A cette catégorie, il convient d’associer tous ceux qui sont nés à l'extérieur
du Rwanda, c'est-à-dire, pendant tout ce temps de refuge. À ce jour, leur âge est compris entre 19 ans et près de 35ans. À ceux-là, il ne doit pas leur être attribué l'idéologie du
génocide car n'ayant ni l'âge de la raison au moment du crime, ni avoir été présents sur le sol rwandais en ces temps là parce que nés en dehors du pays.
Pour l'Autorité provinciale du Nord Kivu les propos du Président tanzanien concernent les deux dernières catégories des rwandais qui sont totalement exclus
de la gestion politique de leur pays, le Rwanda. Évoquer cela n'est ni se faire porteur de l'idéologie du génocide, ni être porte-parole des FDLR.
La RDC, grand modèle de la démocratie politique pour les Etats des Grands Lacs
Le récent sommet de l'Union africaine (UA) couplé avec le 50ème anniversaire de cet organisme, qui s'est tenu le 26 mai à Addis-Abeba, en
Ethiopie, s'est clôturé sur une note de recommandations, qui ont laissé un goût amer à certains pays participants.
De ces recommandations l'une d'entre elles, focalisée sur la situation d'insécurité prévalant dans les pays de la sous-région des Grands Lacs, s'est avérée
comme un pavé jeté dans la mare, par le président tanzanien, Jakaya Kikwete. Faisant l'analyse des conflits récurrents qui minent la sous-région. Kikwete a, à cette occasion,
demandé à ses pairs dont les pays sont concernés, à entretenir la culture du dialogue. En d'autres termes, il a demandé à ce que ces pays se mettent autour d'une table avec ceux qui sont
les auteurs de ces conflits, autrement dit, les rebelles. Une catégorie que l'on trouve aussi bien au Rwanda avec les FDLR, en Ouganda avec l'ADF/NALU et en RDC avec le M23 et quelques
satellitaires.
De ce point de vue, la RDC est déjà engagée dans un processus visant à déboucher sur cette voie. Ce qui justifie l'organisation des assises en cours à
Kampala en Ouganda, sous l'arbitrage d'un négociateur dont la neutralité ne cesse de faire douter les Congolais. Bien que ce forum n'offre pas encore toutes les garanties, l’Ouganda étant
les pieds et les mains impliqué dans le financement et la fourniture au M23 en hommes et en armes de guerre, l'espoir demeure, estiment les organisateurs de processus politique.
Mais, cette question ne relevant pas que de la RDC, il est indiqué que cela soit utile pour l'ensemble des pays de la sous-région. Comme c'est le cas du
Rwanda et de l'Ouganda, deux pays qui ne sont pas non plus exemptes de la présence de l'activisme des rebelles. C'est ce qui a poussé le président tanzanien à exhorter ces pays à opter
pour la voie du dialogue, de négociation avec leurs compatriotes respectifs en rébellion. Proposition pertinente saluée par le reste de la communauté internationale en commençant
par Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies.
Mais loin de réunir l'unanimité, Kigali a trouvé à redire, estimant ne pas se sentir intéressé par cette proposition. Point de vue exprimé par Louise
Mushikiwabo, ministre rwandaise des Affaires étrangères, qualifiant d' "aberrant" les propos du président de la Tanzanie, ajoutant que les FDLR sont un groupe de génocidaires qui
ont quitté le pays après avoir participé à l'élimination de plus d'un millions de Rwandais. Elle a en outre laissé entendre que ceux qui pensent que le Rwanda devrait s'asseoir à la table
de négociations avec les FDLR ne savent pas de quoi ils parlent.
Réagissant à ces propos, l'ambassadeur de la Tanzanie en RDC, Emedy Ngaza a tenu à fixer l'opinion sur le bien fondé de la proposition du président
tanzanien. C'était le mardi 4 juin. Radio Okapi qui s’est fait l'écho de cette réaction, signalait entre autres propos que " La déclaration du président tanzanien n'a rien de
polémique. D'ailleurs, poursuivait-il, elle a été saluée en RDC, par l'Ouganda ainsi que par le S.G de l'Onu. Cela signifie tout simplement que les belligérants s'engagent à
dialoguer pour que la paix soit restaurée ". Il a noté que son pays n'est pas en crise diplomatique avec le Rwanda. " Il s'avère que la déclaration n'a pas été bien accueillie par
les autorités rwandaises. Mais, il est un fait que la Tanzanie et le Rwanda font toujours partie de la communauté des Etats de l'Afrique de l'Est ", a-t-il signifié.
La même source indique que l'ambassadeur du Rwanda à Kinshasa, Armadin Rugira, a réaffirmé la position arrêtée par son gouvernement par la bouche de la
ministre des Affaires étrangères.
Tout compte fait, l'ambassadeur tanzanien en RDC, a rejeté toute idée pour Dar-es-Salam de s'excuser auprès de Kigali. " S'opposer à la proposition du
président tanzanien d'un dialogue entre les belligérants de chacun des pays respectifs, équivaut au refus d'une paix durable dans la sous-région des Grands Lacs, peut-on retenir en
substance. Comme quoi, la proposition du président Jakaya Kikwete a soulevé d'énormes vagues, particulièrement au Rwanda où la démocratie est un vain mot.
Pour Mr Julien Paluku, Gouverneur du Nord Kivu, la paix dans la région des grands lacs passe par la démocratisation des institutions au Rwanda surtout et le
dialogue avec les FDLR.
Eugène Serufuli juge les faiseurs de guerre…
« Ceux qui font la guerre font une sale besogne. Julien Paluku et moi ne sommes ni ennemis ni adversaires ». Propos occasionnels de l’honorable
Eugène Serufuli Ngayabaseka, ancien gouverneur du Nord-Kivu du temps du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (Rcd). Il est déplorable que la population continue de vivre les affres
de la guerre, des actes imprescriptibles, a-t-il déclaré. « Il est temps que tout le monde se lève et que nous y mettions fin…Nous espérons qu’une solution viendra des négociations
de Kampala entre le gouvernement et le M23.Toutes les options pour finir la guerre sont importantes… », a-t-il fait savoir sur la radio Kivu1 de Goma le jeudi, 06 juin 2013.
L’élu de Rutshuru trouve mal de continuer de représenter une population éparpillée par les combats. Les uns en refuge en Ouganda et les autres entassés dans
des camps de déplacés autour de Goma. Cela a beaucoup duré, a-t-il indiqué avant de lancer un appel à toutes les populations de fiel électoral, le Rutshuru de ne pas se faire
manipuler par des aventuriers de tous bords. Pour Serufuli, la guerre du M23 doit impérativement prendre fin et il faut qu’elle finisse vite. Répondant à une question concernant ses
relations avec le gouverneur du Nord-Kivu, l’honorable Serufuli a répondu qu’il n’est pas en conflit avec Julien Paluku : « nous ne sommes pas des ennemis, nous ne sommes
même pas des adversaires », fin de citation.
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